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A la découverte de l'argot
11 mai 2013

Robert Desnos poète résistant mort en déportation a écrit des poèmes en Argot sous le recueil:" A la Caille"

Ce blog est d'ordinaire dédié à l'Argot parisien et, de ce fait plutôt orienté vers la plaisanterie!

Une fois n'est pas coutume, au hasard de mes recherches, j'ai retrouvé dans l'excellent ouvrage de Pierre Seghers (Editions Seghers 1974) consacré à la "Résistance et ses poètes" quelques poèmes écrits par Robert Desnos en Argot, peu de temps avant d'être arrêté et déporté en 1943! Il mourra du typhus une fois le camp de Therensienstadt libéré par les alliés en 1945 !

Sous le recueil : A La Caille", et sous le pseudonyme "Cancale" Desnos a remis à Pierre Lescure quelques jours avant son arrestation les poèmes ci-dessous, que ce dernier publiera sous le pseudonyme ne sachant où se trouvait déporté le poète!

ROBERT DESNOS 4

Ce recueil sera publié à Paris peu de temps avant la mort de Robert Desnos.

Voir le blog de Michel Poullain: http://poetesresistants.canalblog.com/

Les textes sont savoureux ....certains un peu crus....mais.....bon!

 

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Maréchal Ducono

 

Maréchal Ducono se page avec méfiance,

Il rêve à la rebiffe et il crie au charron

Car il se sent déja loquedu et marron

Pour avoir arnaqué le populo de France.

 

S’il peut en écraser, s’étant rempli la panse,

En tant que maréchal à maousse ration,

Peut-il être à la bonne, ayant dans le croupion

Le pronostic des fumerons perdant patience ?

 

À la péter les vieux et les mignards calenchent,

Les durs bossent à cran et se brossent le manche:

Maréchal Ducono continue à pioncer.

 

C’est tarte, je t’écoute, à quatre-vingt-six berges,

De se savoir vomi comme fiotte et faux derge

Mais tant pis pour son fade, il aurait dû clamser

 

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À Pierrot les grandes feuilles sur le fait des « Dieux verts »

 

Pierrot tu jactes bien et, verts comme des dos,

Tes sacrés nom de dieu de Bons Dieux ont la touche

Qui chante à ma mousmée.

Elle en rote, elle en louche

 

Elle en jouit dans sa loque et palpite du pot.

Quant à moi, pour le gringue ayant peu d’à-propos,

Ne m’en ressentant pas pour enculer des mouches,

Je la boucle en serrant ma pipe entre les touches

 

Mais j’estime tes Grecs des durs et des francos.

La mère Guette-au-Trou qui depuis trente berges

Fait son blé des bitards enfournés par nos verges

Peut s’habiller. Jamais les sœurs qui font le tas

 

Ne pourront chier des mecs comme ceux dont tu causes

Autant pisser du pive ou dégraisser son prose

D’un colombin doré reniflant les lilas.

 

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               Frères mirontons

 

Pour le rond, pour le dix et pour la terre jaune,
Une chiée à la dent, mais j’ai l’estomme en vrac
À les imaginer, deux par deux, cul à trac
La dossière et le zob à la mode d’Ancône
.
Tel empapahouta chez nous demande aumône
Aux louchébems ou aux sergots ou même aux macs,
Tels autres sont mordus pour des girons, des jacks
Pour un télégraphiste, enfin pour un beau môme,
Les frères mirontons n’en demandent pas tant,
La ficelle, elle seule, émeut leur palpitant,
Par discipline ils se font donc dorer la rose.
Passe encor de se faire emmancher par un dur
Ou d’aller au petit d’un mignon, d’un pas mûr,
Mais pour l’Oberleutnant se défoncer le prose !

 

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                    Le Bon Bouillon

 

Le grand sorcier peut bien bonir pour les moujinques
La paix ! Le pet ! pour le gnière aux tifs pointus.
Les vingt-deux sont sonnés, vla les flics ! vla la trinque !
C’est deux fois l’heure du bouillon pour le têtu.
Car à Wagram, à la Popinque ou aux Vertus
Il n´est pas un fauché pour endosser son drinke,
Il faudrait être cloche ou fada ou tordu
Pour mettre un seul linvé sur les hitlo-germinques.
Hitler, mon patelin te porte au sinoqué.
Tu l’as voulu, tu l’auras pas, tu vas raquer,
Tu ne t’en iras pas en faisant Charlemagne.
Car, frère mironton, si tu vas au pétard
Tu peux te suicider, à la dure, au pétard,
Mais je crois que plutôt tu en tiens pour le bagne.

 

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                      Le Frère au pétard

 

À Pantin la verdure a pu traîner ses grolles,
Tas de branques farcis de bobards à la noix,
A force de calter s’atigent leurs guibolles
Et, pour roter pardon, ils n’auront plus de voix.
Au train onze on verra s’esbigner les mariolles
Quand nous aurons condé de crécher dans nos bois
Et renifleront au rif des roubignolles
Le nazi dont les sœurs ont payé leurs exploits.
Ils pourront déflaquer au barbu conjugal,
Le bide enflé leur régulière aura grand mal
À vêler les lardons qui porteront leur blaze.
Une chose est cherrer, une autre aller au pieu,
Et les meilleurs cherreurs viennent toujours au lieu
Où plus fortiche attend et leur bouffe le naze.

 

 

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                            Minute !

 

Tu dis vrai quand tu dis qu’ils rembarquent la chtouille
Au pays où l’on cache avec un élastic.
Que déhotent leurs crocs, que valdinguent leurs douilles,
Ils se piquouseront, en gruingue, à l’arsenic.
Mais tu te gourres si tu crois que leur andouille,
Un chouïa, seulement, morfila de vrais crics.
Des boudins, je te dis, panèrent ces panouilles,
Des veaux à faire aller, au refile, un indic.
Ils vont droit aux pétards écumants de vérole,
Ils se croient des caïds, ce sont des branquignoles,
Pour se faire plomber raquant en michetons.
Ils n’ont pas eu nos sœurs, ils n’ont pas eu nos dames,
Ce n’est pas leurs bécots qui leur donnent la rame
Mais de se répéter « Nous sommes les vrais cons. »

 

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                 Petrus d’Aubervilliers 

 

Parce qu’il est bourré d’aubert et de bectanse

L’auverpin mal lavé, le baveux des pourris

Croit-il encor farcir ses boudins par trop rances

Avec le sang des gars qu’on fusille à Paris ?

 

Pas vu ? Pas pris ! Mais il est vu, donc il est frit,

Le premier bec de gaz servira de potence.

Sans préventive, sans curieux et sans jury

Au demi-sel qui nous a fait payer la danse.

 

Si sa cravate est blanche elle sera de corde.

Qu’il ait des roustons noirs ou bien qu’il se les morde,

Il lui faudra fourguer son blaze au grand pégal.

 

Il en bouffe, il en croque, il nous vend, il nous donne

Et, à la Kleberstrasse, il attend qu’on le sonne

Mais nous le sonnerons, nous, sans code pénal.

 

 

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               Rue Aubry-le-Boucher (en démolition)

 

Rue Aubry-le-Boucher on peut te foutre en l’air,

Bouziller tes tapins, tes tôles et tes crèches

Où se faisaient trancher des sœurs comaco blèches

Portant bavette en deuil sous des nichons riders.

 

On peut te maquiller de béton et de fer

On peut virer ton blaze et dégommer ta dèche

Ton casier judiciaire aura toujours en flèche

Liabeuf qui fit risette un matin à Deibler.

 

À Sorgue, aux Innocents, les esgourdes m’en tintent.

Son fantôme poursuit les flics. Il les esquinte.

Par vanne ils l’ont donné, sapé, guillotiné

 

Mais il décarre, malgré eux. Il court la belle,

Laissant en rade indics, roussins et hirondelles,

Que de sa lame Aubry tatoue au raisiné.

 

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Poèmes écrits en 1943 et publiés en 1945 sous le nom de Cancale

pseudonyme de Robert Desnos mort en déportation en 1945

 

 

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Commentaires
G
Rebonjour Michel,<br /> <br /> Vous parlez de l'expression à la caille...je l'ai découverte avec Arletty ( Hôtel du Nord ), je ne l'a connaissais pas ;-)<br /> <br /> A bientôt
Répondre
S
Superbes poèmes... merci, je m'abonne, ayant quelques semaines à passer sans trop courir ! je cherche à traduire béquilles et mémé en argot, et ça bloque ! aucun souvenir de l'argot de mes parents ( pontoisien et parisienne !) je visite donc avec plaisir, merci ! cordialement
Répondre
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  • Dans mon enfance (1950-60),à l'usine (1965-70), à la Villette, dans les Halles, puis à Rungis (1970-2005), j'ai entendu parler les différentes langues vertes et parfois j'ai essayé de comprendre et de parler argot!Il disparaît! Peut-on le faire vivre!
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